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Les orphelins de l’architecture

 

Architecte : HLPS

 

Année de réalisation : 2011

Fonction : Centre culturel - Musée

Ah, ça c'est la faute de l'architecte !

Suite au premier article très élogieux sur le centre culturel de Valparaiso, je me devais d’apporter un complément, qui fera partie d’une série de 6 articles au total sur ce bâtiment. Car la perfection n’est pas de ce monde, il faut bien parler aussi des choses qui fâchent…

« Ce qui est criant c’est le manque de collaboration entre le commanditaire et le programmiste, celui qui a fait le cahier des charges. Là, la faute est clairement sur le programmiste, on sent que le programme a été fait sans concertation. Le cahier des charges, c’est un travail très important, pourtant qu’on ne voit pas. On dit souvent « Ah ça c’est la faute de l’architecte ! Il aurait pu penser à ça, et puis aussi à ça », mais c’est pas seulement la faute de l’architecte, c’est aussi de la faute du commanditaire qui n’a pas su dire clairement ce qu’il voulait. Ou du moins qui n’a pas su exprimer clairement ses besoins, faire de la concertation préalable avec les futurs usagers, les services techniques, etc. Bon, il y a une responsabilité partagée, parce que le travail de l’architecte est aussi d’accompagner, de poser des questions, de préciser ou faire préciser. Les archis sont coupables de ne pas avoir dit à un moment « vous êtes certains que vous ne voulez pas mettre un distributeur de boissons à cet endroit ? Et les boissons vous allez les stocker où ? Comment vous allez faire ça ? », mais au fond c’est le programmiste qui établit le cahier des charges et l’architecte doit s’y tenir. Dans tous les cas c’est quand même dommage d’en arriver là. Quand tu vois les budgets qui sont en face…

 

- Tu veux dire avoir un bâtiment sublime et dans la cafétéria des petits meubles sur roulette en contreplaqué plastifié… et des chaises de bureau en tissu en guise de chaises de cafétéria… ?

- Après il se passe ce qu’on appelle une limite de prestation, le commanditaire dit : « concernant le mobilier, l’architecte choisira 12 chaises », ce sont les chaises design qu’on voit à droite le long des menuiseries, qui vont très bien avec le bâtiment. Et puis il dit « pour le reste, non, on a notre marché cadre, pour le mobilier on fait appel à la même entreprise que d’habitude, on commandera nous-mêmes ». Voilà ce que ça donne : on se retrouve avec des chaises de bureau dans une caféteria et du mobilier qui n’est ni fait ni à faire. Voilà… Ça, ça s’appelle la connerie humaine et on peut malheureusement rien faire contre ça… Mais au fond c’est vraiment dommage que cette cafétéria ait été abandonnée, délaissée.

- Y’a un ficus malingre dans un angle, une fausse cheminée électrique avec un manteau en bois, une exposition de dessins, des pompons colorés suspendus au plafond, on n’est plus du tout dans un bâtiment moderne et épuré là… Pour toi c’est pour rendre l’endroit un peu plus joyeux, plus cosy, plus vivable presque… ?

- Oui… Y’a pas d’autre mot que de dire que c’est du gâchis, c’est dommage, c’est la vie. À un moment donné on a dit « les choses étaient pas très définies, on sait pas qui doit faire quoi, eh ben tant pis, elles finiront bien par se faire ». Et bien voilà comment ça se passe quand les usagers prennent le contrôle. En même temps, c’est leur droit, bien entendu, mais ça peut être pour le meilleur comme pour le pire. On peut aussi incriminer l’archi dans ce cas-là, par son échec total à concevoir un espace chaleureux et accueillant, qui de fait est compensé par les usagers. De toute façon ce qui est sûr c’est que c’est une phase temporaire, mais comme toute phase temporaire, ça peut durer un certain temps… Le bâtiment va vivre et à moment donné y’aura quelqu’un qui dira comme moi « c’est incroyable !» et quand il y aura un peu de budget ils referont quelque chose de bien ! »

larchicolin
Colin Verney
larchicolin@gmail.com

Architecte en itinérance autour du monde, à la recherche de petites perles laissées par ses confrères.

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